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Interview de Stéphane Bourgoin (Tueurs en série ce soir sur France 2)

Edit de mai 2020 : Plusieurs détails concernant la vie de Stéphane Bourgoin ont été invité par lui même a révélé le site Arrêt sur images puis confirmé par le principal intéressé.

Ce jeudi 5 juin à 23h00, France 2 diffusera "Tueurs en série", un documentaire de 90 minutes de Antoine Baldassari et Jean-Charles Lassus et produit par Pasadena Productions. Dans ce documentaire, nous découvrons trois tueurs en série américains au travers de témoignages mais aussi d'entretiens avec ces tueurs réalisés par Stéphane Bourgoin qui a accepté d'accorder une interview au Zapping du PAF.

L'occasion d'en savoir plus sur ces entretiens, la manière dont ils ont été enregistré, "les coulisses" mais aussi l'actualité de Stéphane Bourgoin.

Le Zapping du PAF :Comment vous est venue cette « passion » pour les serial-killers ?
Stéphane Bourgoin : Ce n’est pas vraiment une passion car en 1976, ma compagne a été violée et assassinée quand je vivais aux Etats-Unis et deux ans après j’ai appris que le responsable était un tueur en série et qu’il a avoué une dizaine d’autres crimes. A cette époque on ne parlait pas encore de profiler, le mot serial-killer n’existait pas. Et donc j’ai voulu en savoir plus. Je suis donc allé à la bibliothèque, librairie du congrès à Washington, en Californie où ils ont la plus grande bibliothèque d’ouvrages de psychologie au monde et j’ai absolument rien trouvé. J’ai donc décidé de commencer à mener mes propres recherches. Et donc, depuis 1979, j’ai interrogé 57 tueurs en série différents à travers le monde et j’ai écrit une vingtaine d’ouvrage sur le sujet.

LZDP : Pouvez-vous nous présenter en quelques mots le documentaire « Tueurs en série » qui va être diffusée sur France 2 ?
SB : C’est justement d’actualité en ce moment avec l’actualité du procès Fourniret. J’ai d’ailleurs fait un livre sur cette affaire avec les familles de victime car je suis en même temps un des membres fondateurs de l’une des plus grandes associations de victimes de France qui s’appelle « Victimes en série ». Il me semblait donc intéressant de mieux comprendre la psychologie particulière des tueurs en série car dans un crime « ordinaire » le mobile est connu car il s’inscrit au sein de la tribu familiale mais dans le cas des tueurs en série, l’assassin et sa victime ne se connaissent pas et il faut donc chercher le mobile dans les fantasmes du tueur et donc aller dans sa tête. Contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas toujours un crime gratuit car il y a la notion de plaisir de tuer chez le serial-killer et ce désir n’est pas toujours sexuel.

LZDP : La force de « Tueurs en série » est les interviews de ces trois criminels, comment avez-vous fait pour les rencontrer et qu’est ce qui a poussé ces hommes à se confier? Rien ne les y obligeait.
SB : Bien sûr que non. Pour moi ça m’est rendu plus facile car j’ai écrit une vingtaine d’ouvrages sur le sujet qui ont pour certains ont été traduits dans une vingtaine de pays depuis 10 ans, je m’occupe de formations auprès de l’Ecole de la gendarmerie nationale où je leur apprends la psychologie particulière du tueur en série. Et donc pour obtenir les autorisations, ça m’est un peu plus facile que par le passé mais ça demande quand même un certain temps. Il y a d’abord des tueurs en série qui refusent, d’autres qui acceptent tout simplement car certains comme Ed Kemper n’ont pas eu de visites depuis des années. Ca peut représenter pour eux une certains forme de distraction, un plaisir aussi de raconter leurs meurtres.

LZDP : N’était ce pas difficile de leur adresser la parole alors que ces hommes avaient été condamnés pour meurtre ?
SB : Évidemment oui. Ce qui est beaucoup plus difficile pour moi ce n’est pas l’entretien en lui-même, c’est qu’il faut faire abstraction de tout ce que le cinéma nous a montré. On n’est pas dans « Le silence des agneaux ». Il n’y en a pas un qui est menotté ou que j’interroge derrière une paroi vitrée. Sauf un et c’était dans le cadre d’un reportage pour « Envoyé spécial » mais c’était le seul. Le contact est libre car il faut créer un lien avec l’individu en face de vous qui est un psychopathe, un manipulateur, un menteur avéré. Car si vous ne créez pas un lien avec lui, vous portez un jugement sur les faits qu’il a commis et il va se refermer comme une huître. Il faut donc avoir cette capacité d’écoute, il ne faut pas se laisser manipuler et il faut à votre tour lors des interrogatoires de les manipuler également. Pour Gérard Schaefer, j’utilise d’autres tueurs en série par qu’en me parlant de ce tueur à la 3ème personne, il finisse par me raconter ses propres fantasmes.
Quand on est face à eux, on est tellement concentré dans notre travail en épiant leurs gestes, réfléchir à la prochaine question, que vous n’avez pas le temps de vous impliquer personnellement et de penser à l’horreur de ce qu’il vous raconte. C’est par la suite en visionnant les entretiens que ça devient difficile à gérer.

LZDP : Quelles ont été vos premières impressions en rencontrant pour la première fois Edmund Kemper, Roderick Ferrel et Gerard Shaefer ?
SB : Ed Kemper c’est la masse physique avec ses 2m15 et ses 160kgs. Les premières heures quand je lui posais des questions qui ne lui plaisaient pas, il se penchait par dessus la table qui nous séparait et il mettait son nez contre le mien et me regardait droit dans les yeux en me disant « Tu peux répéter la question ? ». Ca, c’était un peu déstabilisant. Pour Gérard Shaefer, dès l’instant où je me suis retrouvé face à lui, j’ai eu la chair de poule, ma nuque s’est coincé, l’impression d’une aura maléfique alors qu’ils charmant et souriant d’apparence. C’est une impression que j’ai jamais ressenti ni avant ni après. Pour Ferrel, il est resté impassible pendant toutes les heures d’entretien et ne m’a quasiment jamais regardé dans les yeux.

LZDP : Quelle est la rencontre qui vous a le plus marqué ?
SB : Je dirais Shaefer car ça m’a beaucoup déstabilisé et je dirai que c’est peut-être le tueur qui au monde, dans l’histoire criminelle, rassemble le plus grand nombre de perversion.

LZDP : D’autant plus que personne ne sait combien de personne il a réellement tué.
SB : J’ai des courriers de lui où il raconte qu’on l’a accusé de 34 meurtres mais il indique qu’il en a tué probablement entre 80 et 100. Il m’explique de manière extrêmement froide par exemple « Est ce que je dois tenir compte du fait que lorsque j’enferme une victime bâillonnée dans le coffre de ma voiture, elle s’étouffe sur son vomis ; est ce que ça compte pour un meurtre ou un accident ? » ou encore « J’ai tué un certain nombre de femmes enceintes, dois je compter deux meurtres ou un seul ? ».

LZDP : Serait il envisageable de faire un documentaire de ce type en France avec par exemple le cas Fourniret ?
SB : Jusqu’à présent, c’était impossible. J’ai des images d’interrogatoires de tueurs en série français  que j’utilise pour mes formations auprès des gendarmes mais qui ne sont pas destinées à être diffusées. Mais c’est vrai que c’est quelque chose qu’il faudrait absolument faire en France. Nous avons dans nos prisons 76 cas de tueurs en série depuis 1999 et on ne les connaît pas du tout. Il faudrait qu’il y ait un group de gendarmes et d’experts qui puissent aller interroger nos propres tueurs et violeurs en série pour que les policiers, gendarmes et magistrats puissent utiliser ces entretiens et savoir par exemple comment ils font pour approcher les victimes, s’ils sont sédentaires ou nomades, utilisent-ils un complice…. Tout ça on l’ignore et ce serait donc utile. Je pense que d’ici quelques temps, il me sera possible d’obtenir ces autorisations.

LZDP :Vous-même, vous vous occupez aussi d’une librairie ?
SB : Oui, ça s’appelle Au-troisieme-œil.com, qui est actualité tous les jours sur l’actualité de la criminologie et les faits divers.

LZDP : Et vous en parliez tout à l’heure, vous faite aussi parti d’une association.
SB : Oui victimes en série. Il y a sur le site (www.victimes-en-serie.org) un compte rendu quotidien du procès Fourniret qui est fait par les familles de victime. (NB Interview enregistrée durant le procès).

LZDP : Quels sont vos projets à venir ?
SB : Oui j’ai des collections de dvd, de films noirs, une collection qui s’appelle Serial Polars chez Bach Films. J’ai aussi une collection que j’ai lancé qui s’appelle « Serial doc » où j’ai lancé le seul dvd de l’affaire Fourniret. Prochainement, d’ici un mois, je sors deux dvd avec près de six heures de mes entretiens (en V.O.S.T.) avec différents tueurs en série que je décrypte pour ces dvd.

Merci beaucoup Stéphane Bourgoin !

Crédit photo : Isabelle Longuet Bourgoin / Olivier Launay
Remerciements : Stéphane Bourgoin & Pasadena Prod

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