[Billet d'humeur] Foot et média

05.03.2007

Si le foot traverse une crise de violence dans les stades, tout va bien au niveau média. A quelques semaines des nouvelles attributions des droits d’images de la Ligue 2 et dans un an de la ligue 1, les chaînes préparent leurs stratégies offensives.

Car les enjeux sont énormes. Quand canal + déboursa 600 millions d’euros annuels pour les droits exclusifs de la ligue 1 de football, son double objectif était de conquérir de nouveaux abonnées et de faire chuter son rival de l’époque TPS. Aujourd’hui, le nombre d’abonnés est en forte hausse et TPS va fusionner avec CANLALSAT malgré l’opposition du puissant Patrick LELAY qui aurait bien aimé préserver l’indépendance de sa filiale. Cette dernière devant se contenter de l’exclusivité de championnats étrangers pour garder une image foot.

Le foot est le sport qui donne à une chaîne son statut de « Grande chaîne ».

En 1998 pour la coupe du Monde, M6 annonçait le 0% foot sur son antenne faute d’avoir pu acquérir des droits de diffusion. Une stratégie plus subie que volontaire. 10 ans, plus tard, la chaîne, dotée d’une émission 100% foot, se félicite d’avoir perdu 20 millions d’euros à la dernière coupe du monde pour diffuser des matches, et d’avoir modifié le regard des clients sur la chaîne. Les clients sont bien entendu les annonceurs et non les téléspectateurs Le Foot est un formidable produit d’appel pour les régies publicitaires.

Pour gagner cette image foot, la bataille est rude autour des spécialistes, commentateurs et consultants. Le suspense de leurs transferts est digne des joueurs pros. Exemple, Thierry Roland viré par TF1, reçoit une proposition de M6 en recherche de crédibilité. Sachant cela, TF1 fait une contre proposition dont le seul but et d’empêcher la concurrence d’avoir son ancien commentateur vedette. C’est digne d’une stratégie de l’OL. M6 cherche des appuis dans les instances du Foot français où TF1 à une grande influence. Elle n’hésite pas à confier la présentation de 100% foot à la compagne du sélectionneur des bleus. Sans remettre en question son professionnalisme, on peut se demander si derrière cela la chaîne n’entame pas une opération de séduction aux plus hauts niveaux. Son but, être prête à conquérir le droit, tant convoité, de diffuser les images du championnat de Ligue 1 le dimanche matin détenu par l’incontournable émission Téléfoot.

Téléfoot, émission qui sans concurrence directe, n’attire les téléspectateurs que parce qu’elle détient un droit exclusif : celui de la ligue 1 (et celui des bleus). Cette émission people sur le foot, regardée par les sportifs du dimanche qui restent affalés sur leurs divans à s’exciter devant la défaite de leurs équipes, ne parle jamais de technique, du jeu en lui même et de championnats inférieurs à la ligue 1. Tout cela à cause des droits à l’image qui sont dispersés. La ligue 2 est sur Eurosport, la coupe de France et la coupe de la Ligue sur France Télévision, le fan de foot ne trouve pas une vraie émission « global » sur le foot. Stade 2 est passée maître dans l’art de faire des reportages sur les à cotés des matches à défaut d’avoir les images du jeu.

La LFP, prenant l’exemple de l’Angleterre dont les droits télés sont passés de 800 millions à 1.4 millard d’euros par an, voit l’avenir avec confiance et surtout avec une belle perspective d’entrée d’argent. Tout cet argent favorise forcement les tensions, les haines, les convoitises, les excitations médiatiques, qui s’en ressentent sur le terrain et dans les tribunes. La corrélation entre argent et violence n’est pas à nier même si ce n’en est pas la seule cause.